Il y a une façon d'employer le mot qui fonde l'éveil de la conscience sur l'extension sociale de la notion d'homme. Retournant le rapport ordinaire des facultés entre elles, cette discipline exige qu'au lieu d'envelopper l'être, le connaître aspire à s'en envelopper et pose l'un comme le germe de tous.
Ce livre rassemble trois écrits de Joë Bousquet : le premier est inédit, c'est une lettre à Jean Ballard. Le second se trouve dans un mince ouvrage peu connu dont il constitue la dernière partie : Traduit du silence, volume de 56 pages, paru en mai 1939. Le troisième, Souvenir de René Daumal, est l'hommage rédigé par Bousquet à l'annonce de la mort de Daumal. Le temps, qui a porté très haut le surréalisme, n'a pas encore rendu justice au Grand Jeu ni à Joë Bousquet. Cela n'a d'ailleurs aucune importance, car c'est la mort qui fixe et statufie : nous, les vivants, ne savons jamais ce qu'elle mettra à notre place pour déguiser l'absence. Le Grand Jeu n'est pas plus un sous-groupe surréaliste que Bousquet n'est "un" écrivain, lui qui cache sous son nom tout un mouvement anonyme, dont les voix multiples n'en finissent pas de troubler l'eau du regard trop chargée de présence et n'en finissent pas non plus de faire fleurir des visages au bord de l'amour devenu, par lui, énergie de la langue.
Bernard Noël (extrait de la note introductive)
1996, note de Bernard Noël
32 pages, format 15x21 cm, ISBN 2-87704-093-3, 13 €