Monuments de silence

Réappropriations mémorielles dans l'art contemporain

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Comment parler de la mémoire face à des monuments déjà loin mais encore proches, face à des représentations jadis inébranlables, aujourd’hui désavouées ? Les œuvres réunies ici ont en commun d’éviter des déclarations et de procéder par touches qui ébranlent les croyances. Ironie, scepticisme, parfois nostalgie sont les traits que partagent ces travaux. Tous critiquent une histoire figée et immuable et rendent compte du caractère mouvant et hybride des représentations.

 

Bunkers de la seconde guerre mondiale désaffectés sur les plages normandes, statues de l’ère soviétique déboulonnées, monuments coloniaux relégués dans l’oubli ; étranges silhouettes, à la fois familières et distantes. Qui décide du paysage mémoriel, de la représentation de la mémoire collective ? Dans Monuments de silence, Anne Bernou interroge et documente les mouvements de la mémoire et la réappropriation par des artistes contemporains de monuments publics, aujourd’hui désinvestis, oubliés ou détruits. De Jochen Gerz et son travail autour des monuments aux morts à la falsification volontaire des objets mémoriels par Christian Boltanski, des captations de la falaise des Bouddhas géants de Bâmiyân détruits par les talibans par Pascal Convert aux déclinaisons de bunkers opérées par Raphaël Denis, d’Amina Menia et son utilisation des archives des monuments algériens à la réflexion de Thu Van Tran autour des origines et de l’exil, des statues de l’ex-monde soviétique mises en scène par Emilija Skarnulyte aux installations autour de la fragmentation et de l’oubli de Marianne Mispelaëre, plusieurs générations d’artistes figurent dans cet ouvrage, des plus connus aux plus émergents, chacun se penchant à sa façon sur la question de la mémoire et de l’identité ; préfigurant pour certains d’entre eux les mouvements sociaux qui ont surgi, aux États-Unis notamment avec le mouvement Black Lives Matters. Chacun sonde, détourne et réactive, avec son langage artistique propre, les tragédies du XXe siècle, le passé colonial, les dominations politiques et les autoritarismes mémoriels dont la trace parfois monumentale s’impose dans l’espace public. Cette diversité des approches, par des artistes qui se confrontent au passé européen plutôt que de l’oblitérer, démontre le registre multiple des regards et des compréhensions, reliant la dimension intime à la dimension historique, dans une réactivation de la mémoire collective génératrice de présent réconcilié.

 

Cet ouvrage largement illustré étudie des œuvres de Mathieu Kleyebe Abonnenc, Niels Ackermann, Sammy Baloji, Joachim Bandau, Guillaume Barborini, Christian Boltanski, Pascal Convert, Sylvain Couzinet-Jacques, Nicolas Daubanes, Raphaël Denis, Leo Fabrizio, Jochen Gerz, Felix Gonzalez-Torres, Marie Havel, Kiluanji Kia Henda, Elizaveta Konovalova, Vladimir Kozin, Roland Anton Laub, Amina Menia, Marianne Mispelaëre, Yan Morvan, Tania Mouraud, Ciprian Muresan, Deimantas Narkevicius, näutil, Mathieu Pernot, Anne Reijniers & Rob Jacobs, Emilija Skarnulyte, Thu-Van Tran, Paul Virilio, VOID.

 

2023, avec 29 illustrations en couleur et 40 en noir et blanc et quatre entretiens inédits avec Elizaveta Konovalova, Amina Menia, Marianne Mispelaëre et Arnaud Eeckhout (VOID)

320 pages, broché cousu, format 15 x 21 cm, ISBN 978-2-87704-257-4, 27 €

Imprimé en France

Paul Virilio

sans titre, sans date

 

Nicolas Daubanes

Hôtel de Ville, 2020

Niels Ackermann

Kremenchuk, 30 March 2016

Marianne Mispelaëre

On vit qu'il n'y avait rien à voir, 2018

 

Christian Boltanski

Réserve des Suisses morts, 1991

 

 

Emilija Škarnulytė

Aldona, 2013

Tania Mouraud

Backstage 092, 2013