Ciel sans prise

 

 

 

 

Des miettes

de vous

 amis

des sons qui

m’abritent

et me délient.

Sur eux je veux

reposer

puis avec eux

me confondre

 aux océans

inventer

 la fugue.

 

Entre suspension et recueillement, Ciel sans prise s’ouvre sur le repli d’une humanité réduite à ses chambres, persiennes et portes fermées, rues vides. Une humanité qui a « trop vu et trop ri à la face des dieux », et surtout, « trop haï ». Du fond de cette solitude, de cette geôle de silence, surgit l’absence de l’autre, et l’immense mélancolie d’une histoire personnelle et collective qui serait arrivée à son terme. Face à ce pressentiment hanté, face à cette parole tue et à ce monde arrêté, Esther Tellermann plonge l’absence dans une forme d’attente, dans un bain de souvenirs, parlant, dit-elle, « depuis le seuil d’où je te veille », et d’ajouter que nous n’avons que deux langues, « l’une apprise, l’autre nocturne » – alors ce sera la nocturne. Une longue prière, un accompagnement dans l’adieu. Livre écrit d’une voix « d’où parvient la terre », livre de veillée, livre de mémoire et de rêves interrompus, plongé dans la solitude de la chambre où l’on réinvente l’autre, sa lumière, en forme « d’île lointaine » dans la nuit. Pour réinventer l’autre et le monde quand il se fige, Esther Tellermann convoque contre l’effacement ses « contes de papier », le grand jardin familier de ses poèmes : plein de jasmins, de safran, de sauge, d’amandiers et d’églantiers, souhaitant par là même retrouver un espace ouvert et intime. Jardin doublé d’un verger de souvenirs, lieu de l’ami disparu, des rencontres, et d’un temps où l’on pouvait se toucher, se parler, être en vie. Avec paumes, tempes et paupières former des gestes contre la disparition. Ciel sans prise est un « long ensevelissement à travers les saisons du souvenir ». Esther Tellermann traverse les ombres dans un dernier accompagnement, ouvre un tombeau qu’elle peuple de paroles contre l’aphonie humaine, qu’elle plante de bouquets d’arbres et de parfums, pour déposer le compagnon dans ce lieu de la mémoire, refusant de perdre l’infini du cœur du monde dans les « fracas du souvenir ».

 

2023, 128 pages, format 15 x 21 cm, broché cousu, ISBN 978-2-87704-259-8, 20 €

Imprimé en France

Tirage de tête

Tirage de tête limité à XXII exemplaires sur Vélin d'Arches, comprenant une peinture originale de Bernard Moninot, signée.

 

300 €